Depuis les lourdes barques à voiles de cuir des Santons, témoins d’un trafic maritime datant d’avant l’époque
romaine, jusqu’aux puissants chalutiers et chalands ostréicoles d’aujourd’hui en passant par toute une
palette de voiliers jusqu’à l’avènement de la motorisation, on a su ici entre Charente et Gironde
concevoir des bateaux bien ciblés sur les activités du bassin de la Seudre maritime.
Un témoignage très précis sur les différents types de bateaux à l’époque de Louis XIV est donné par «
l’Album de Jean Jouve (dit album de Colbert) publié en 1679. Cet ouvrage sur les flottilles entre Nantes
et Bayonne consacre deux planches sur vingt-quatre à notre secteur, l’une pour les bateaux de la
Seudre, l’autre pour ceux de Mornac. Sur chacune, quatre types de bateaux sont présentés avec leurs
activités. Ils sont armés dans les ports de Ribérou, Dercie, Chalon, Mornac, Chaillevette, Avallon et la
Tremblade. Ce sont des voiliers de cabotage et de pêche depuis les trois-mâts « terre-neuviers »
jusqu’aux chaloupes de pêches saisonnières, telle la sardine et de dragage des huîtres et des moules.
Le sel de Seudre était très apprécié des pays scandinaves et des négociants néerlandais. Au port de
Bergen en Norvège, on le préférait pour le salage des « rogues », les oeufs de morue expédiés vers la
Bretagne et utilisés comme appâts pour la pêche à la sardine.
Dans ce trafic du sel, les Hollandais ont été très actifs. On leur doit les premières cartes des « achenaux
» (des chenaux) tel Recoulaine. Au XVIIIème siècle, le sel blanc du Liman (secteur entre Momac et
l’Eguille) reconnu pour sa qualité était coté au marché d’Amsterdam.
En l’an 1712 on enregistre soixante-douze demandes de chargements de sel devant Mornac par les
Néerlandais.
Après les voiliers, caboteurs et chaloupes gréées depuis les temps anciens à voiles carrées, les
gréements à corne et voiles auriques se sont imposés en Seudre au cours du XIXème siècle.
Les bateaux de pêche les plus importants de huit à douze mètres, très toilés, étaient gréés en sloop ou
en cotre (soit avec une ou deux voiles d’avant).
Du côté des usages traditionnels, il faut noter chez ces marins de Mornac la pratique des apports
groupés. Lorsque les vents étaient contraires, les captures de tous les bateaux, à l’abri dans l’anse de
Gatseau, étaient rassemblées à bord d’une seule embarcation menée à l’aviron par une bordée de
volontaires. Ceux-ci remontaient la Seudre à la rame pour le débarquement de toutes les pêches au port
de Mornac où le poisson était pris en charge par les femmes des pêcheurs. Les autres équipages au
mouillage restaient en attente du retour de leurs collègues apportant des vivres frais et surtout du pain.
Au XVIème siècle, c’est la pêche du « poisson vert », la morue, qui est pratiquée à partir de la Seudre,
dans le sillage des Basques qui venaient charger de grandes quantités de sel.
Une soixantaine de ces « terre-neuviers » ont été armés pendant plus d’un demi-siècle pour ce que l’on
appelait « la grande aventure ». C’étaient des voiliers à trois mâts pouvant jauger jusqu’à cent quatre
vingts tonneaux et embarquer dix-huit hommes.
Dans le travail des huîtres développé en Seudre depuis le début du XVIIIème siècle, les embarcations
ont toujours évolué. Pratiquant le dragage sur les gisements naturels, les chaloupes puis les yoles ont
servi les besoins des « huîtriers », les précurseurs des ostréiculteurs (ce mot n’apparaît qu’en 1875) qui
exploitaient déjà en 1730 plus de sept mille claires sur la rive gauche de la Seudre.
Pour garnir les bassins d’élevage et d’affinage, on a fait appel à partir de 1850 aux chasse-marée
bretons venant livrer des huîtres plates vendues à la barrique et repartant souvent avec des fûts de vin.
Il s’agissait de palier l’épuisement des bancs naturels d’huîtres soumis à la surexploitation.
Avec le développement des élevages ostréicoles, à partir des années 1870, les sloops, yoles et lasses
ont été de plus en plus sollicités. Puis, pour faciliter le travail, de nouvelles embarcations à faible tirant
d’eau sont apparues : les pinasses motorisées puis dans les années 1950 les « bacs » à cabines
avancée, remorquant de grandes lasses !
Dans les années 1970 la nouvelle mutation des cultures surélevées provoque l’avènement de nouveaux
équipements navigants. Ce sont les chalands de grande capacité, puissamment motorisés et
maintenant dotés de moyens de levage très performants.
Association pour une culture de terroir, à partir des réalités du milieu côtier, du respect de ses qualités et de la transmission des savoir-faire traditionnels.